La campagne de karité se termine en Afrique de l’Ouest. On parle de ces fruits qui contiennent une amande qui donne après transformation du beurre de karité et des substituts utilisés dans l’industrie agroalimentaire. Cette campagne a été marquée par la fermeture des frontières de cinq producteurs (Mali, Burkina Faso, Nigeria, Côte d’Ivoire, Togo) qui ont interdit les exportations d’amandes brutes dans l’objectif de contenir les prix et d’alimenter les usines locales.
Après le Mali, le Burkina Faso, le Nigeria, la Côte d’Ivoire et le Togo, le Ghana pourrait être le prochain sur la liste. Dès janvier 2026, le pays pourrait lui aussi interdire les exportations d’amandes brutes, ont laissé entendre les autorités. Une information qui, si elle se confirmait, rebattrait encore plus les cartes pour les industriels étrangers, telles que le danois AAK et l’indien Manorama.
Faute de pouvoir se fournir chez les principaux producteurs, ils ont tous misé cette saison sur le Ghana. Cette pression a fait s’envoler les prix, les acheteurs étant prêts à payer plus de 700 Francs CFA le kilo d’amandes de karité, soit près du double de ce qui a été en moyenne pratiqué dans des pays voisins. « Ils ont paniqué et par peur de ne pas pouvoir honorer leurs contrats, ils ont tué le marché », commente un industriel installé dans la sous-région.
À ce niveau de prix, il est difficile pour les transformateurs locaux de s’approvisionner, d’autant que les prix du beurre de karité en sortie d’usine ne sont pas suffisants pour réaliser une marge. La seule solution pour certains est de louer leur infrastructure à une majeure : c’est ce qu’on appelle le « tolling », pour ne pas fermer boutique.
Ces prix ont eu une autre conséquence. Ils ont attiré d’importants volumes d’amandes de karité du Mali et du Burkina Fasoet ce, malgré l’interdiction décrétée par ces pays. Le Ghana ne produit que 30 à 40 000 tonnes sur son sol, mais pourrait afficher cette année un chiffre d’exportation trois à quatre fois plus élevé, assure l’un de nos interlocuteurs.
Des prix contenus dans les pays qui ont arrêté l’export
Les interdictions d’exporter au Mali et au Burkina Faso sont perçues comme globalement efficaces dans le sens où elles ont permis de contenir les prix et ont facilité l’approvisionnement des usines locales. L’objectif de protéger le secteur a donc en partie fonctionné, mais pas totalement. L’interdiction d’exporter a été brutale et les transformateurs qui n’avaient pas le réseau de vente suffisant, ni les finances pour acheter les stocks d’amandes rendus tout d’un coup accessible, n’en ont pas profité.
Fr Côte d’Ivoirel’interdiction prise en janvier, a empêché les gros industriels de se ruer vers le pays comme ils l’ont fait au Ghana, ce qui se ferait au détriment des transformateurs locaux. « Si les exportations n’avaient pas été interdites, le secteur aurait été mis en faillite », résume un acteur local.
Mesure essentielle, mais pas suffisante en Côte d’Ivoire
La mesure n’a cependant pas suffi à approvisionner toutes les usines ivoiriennes, car la capacité de transformation a explosé ces dernières années dans le pays : les usines peuvent désormais transformer environ 300 000 tonnes, soit beaucoup plus que la production ivoirienne, inférieure à 20 000 tonnes selon plusieurs sources.
Ce qui a permis aux usines de ne pas sombrer, c’est soit de transformer un autre oléagineux, tel que le soja, soit de profiter des volumes passés en fraude depuis le Mali et le Burkina Faso. Un industriel assure qu’en moyenne, sur dix camions qu’il a reçus ces derniers mois, sept transportaient des amandes de karité du Mali, un camion des amandes du Burkina et deux acheminaient réellement de la production ivoirienne. Pour lui, « les grands gagnants de cette mesure sont les douaniers maliens et burkinabés ».
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