Entre janvier et juin 2025, les importations agroalimentaires de l’Union européenne ont progressé de 16 % par rapport à la même période en 2024, atteignant 96,8 milliards € contre 83,3 milliards € un an plus tôt, selon le rapport Monitoring EU Agri-Food Trade. Cette hausse s’inscrit dans un contexte de renchérissement marqué des prix des premières matières agricoles, et de fortes pressions sur les chaînes d’approvisionnement européennes.
Le café, le thé, le cacao, ainsi que les fruits et les noix dominent les importations de l’UE en provenance du continent africain. Si le Maroc y reste son premier fournisseur, la Côte d’Ivoire est de son côté le pays affichant la plus forte progression en valeur des exportations.
Dans le même temps, les exportations agroalimentaires du bloc européen ont atteint 118,7 milliards €, demeurant ainsi supérieures aux importations. Cette performance repose en grande partie sur la solidité de ses filières agricoles, notamment les céréales et les produits laitiers, qui constituent historiquement le moteur de son offre exportatrice.
Une Europe sous pression importatrice
La hausse des importations européennes résulte d’une combinaison de plusieurs dynamiques. D’une part, l’augmentation des prix internationaux de produits comme le cacao, le café ou les noix contribue directement à gonfler la valeur des flux entrants. D’autre part, l’UE a vu son excédent agroalimentaire se réduire à 21,9 milliards €, en recul de 33 % sur un an, sous l’effet de la forte augmentation des coûts d’importation.
Ces évolutions suivent alors que le secteur agricole européen demeure fragilisé.
Selon un rapport publié par la Banque européenne d’investissement (BEI) et la Commission européenne, l’agriculture fait face aux conséquences croissantes du changement climatique, dans un contexte de concurrence mondiale accumulée sur les denrées alimentaires. D’après l’étude, le secteur agricole européen perd plus de 28 milliards € en moyenne par an, en raison de conditions météorologiques défavorables, notamment les sécheresses, alors même que les agriculteurs doivent composer avec des exigences réglementaires de plus en plus strictes.
La Côte d’Ivoire, de producteur à exportateur stratégique
Pour la Côte d’Ivoire, cette conjoncture représente à la fois une opportunité majeure et un défi stratégique. Le pays ouest-africain tire profit de la forte demande européenne et de l’envolée des cours du cacao, dont il est le premier producteur mondial, pour renforcer sa position sur ce marché. Les exportations agroalimentaires ivoiriennes vers l’UE ont ainsi augmenté de 2 milliards €, soit +66 %, pour atteindre 5 milliards € au premier semestre 2025. Ce chiffre hisse Abidjan à la sixième place des fournisseurs de l’Union.
Cette performance est effectivement directement liée à la flambée des prix du cacao, dont les cours ont franchi à deux reprises la barre historique des 10 000 $ la tonne sur les marchés à terme de Londres et de New York entre janvier et juin 2025. Cette dynamique a contribué à l’excédent commercial de 2,6 milliards $ (environ 2,253 milliards €) affiché par la nation éburnéenne au premier semestre. Au-delà de cet effet prix, cette dernière s’efforce d’inscrire sa stratégie dans la durée à travers un recentrage sur la transformation locale, la diversification des cultures et la structuration des filières.
Cette politique s’accompagne d’exigences renforcées en matière de traçabilité, de durabilité et de gouvernance, devenues centrales dans la politique commerciale de Bruxelles. Alors que le règlement européen sur l’interdiction de l’importation de produits issus de la déforestation pourrait entrer en vigueur dès le 30 décembre 2025, sauf nouveau rapport, la Côte d’Ivoire s’est engagée depuis plusieurs années dans une réforme en profondeur de la filière cacao, considérée comme l’un des principaux moteurs de la déforestation dans le pays.
Ainsi, en 2022, les autorités ivoiriennes ont adopté une stratégie nationale pour un cacao durable, mettant en avant la protection des écosystèmes ainsi que des producteurs. Cette orientation bénéficie du soutien des partenaires européens : la même année, l’initiative Team Europe a annoncé l’octroi d’une enveloppe de 450 millions € pour accompagner le développement d’une filière cacao durable en Côte d’Ivoire.

